Spike Jonze, l'un de mes réalisateurs fétiches aussi bien pour ses longs métrages que pour ses clips, signe un magistral retour avec her, l'histoire d'un homme un peu perdu affectivement qui tombe amoureux de son nouvel OS (Operating System). Cela pourrait paraître à première vue un peu alambiqué si ce n'était justement là la marque de fabrique de Spike Jonze et son terrain de jeu de prédilection qui a fait sa renommée, notamment à l'époque du jubilatoire Dans la peau de John Malkovich ou dans Adaptation, sa vertigineuse mise en abîme cinématographique.
Avec her, Spike Jonze nous offre à nouveau une perle cinématographique à l’esthétisme chaleureux, d'une grande sensibilité et d'une grande intelligence, très loin des clichés post apocalyptiques habituels ressassés sans relâche dans la majeure partie des films futuristes ou de science-fiction. Ici, pas de jugement sur la technologie, juste une histoire, simple, sensible, dans un futur non identifié mais que l'on pourrait presque rêvé à penser plausible. On peut lire un peu partout que ce film se situerait dans un futur plutôt proche ou au contraire dans un rétro futur. Mais pour moi, ce niveau d'intelligence artificielle ne peut se situer que dans un futur lointain, qui adviendrait après les différents stades de tentative de maîtrise de l'enveloppe corporelle par l'homme grâce à la génétique et la cybernétique, et où il ne resterait au final que son essence, l'intelligence pure dénuée d'enveloppe charnelle et diluée dans un réseau sans finitude spatiale et temporelle.
Mais plutôt que de s'éparpiller dans une vision grandiloquente qui tenterait d'aborder en vain de nombreux domaines, Spike Jonze a eu la finesse de ne s'intéresser qu'à l’essentiel et de ne traiter qu'une seule et unique question - mais certainement l'une des plus fondamentales : puisque l'homme est sur le point de réussir à dissocier l'intelligence du corps dans lequel elle était jusqu'à présent prisonnière, est-ce finalement notre corps ou notre intelligence qui nous rend ce que nous considérons comme "humain" ?
En proposant dans her une analyse nouvelle du monde, Spike Jonze donne tout son sens au septième art et questionne avec subtilité et humour la nature profonde de l'être humain face à ce qui sera sa création ultime : l'intelligence artificielle.
Nul ne sait la part de vérité de cette vision du futur et quelle forme pourra prendre l'intelligence artificielle, mais en tout cas ce qui est sûr et que l'on peut admirer dans ce film , c'est que celle de Spike Jonze, elle, est bien réelle.
Pour finir, un petit lien très intéressant au sujet du film : L'analyse de la couleur rouge dans le film Her